«Il est important de prévoir un temps d’intégration et d’adaptation », Julien , VSI multipays (Congo et Tchad)

Le départ en VSI au Congo Brazzaville était ma première vraie expérience en ONG. J’étais dans l’interrogation : allais-je être à la hauteur de ce qu’on me demande ?
Je n’avais pas d’idée préconçue ni sur le poste ni sur le pays même si c’était quelque chose de complètement nouveau pour moi.

Après la mission au Congo, lors de mon départ pour le Tchad, j’étais dans l’excitation de partir sur une nouvelle mission, dans un nouveau pays, une nouvelle culture.

Pour ma prise de poste au Tchad, je savais mieux à quoi m’attendre, je connaissais déjà le projet et l’équipe [les trois différentes équipes s’étaient rencontrées lors d’assises internationales en février 2016 au Congo]. Cela facilite l’intégration.

J’ai pris conscience au bout d’environ un mois et demi que ma position était différente de celle du Congo. En effet, au début de mon travail au Congo, je faisais également l’intérim du chargé de mission production/qualité. Situation pouvant créer une réelle ambigüité avec l’équipe et les partenaires si la mission du VSI n’est pas clairement présentée au début. Toutefois, cette expérience a été bénéfique pour l’ONG du Congo qui a pu repartir sur des bases plus solides sur les aspects de suivi de production et qualité des cuiseurs économes. Au Tchad, le chargé de mission était déjà en poste avant mon arrivée. Cette distinction a facilité mon travail avec les artisans forgerons Tchadiens.

Il y a également eu des évolutions au cours de la mission : je devais faire du renforcement de compétences auprès du chargé de mission production/qualité. J’ai finalement travaillé auprès de l’ensemble de l’équipe : formation à l’écriture d’un compte-rendu de réunion, à la gestion d’emails,  à la conception assistée par ordinateur, etc.

Cette expérience m’a apportée différentes choses : j’ai découvert le fonctionnement d’une ONG, j’ai participé concrètement à un projet de développement en relation directe avec les bénéficiaire et, les acteurs. J’ai eu des tâches dans lesquelles j’étais relativement en autonomie : cela m’a permis de me développer personnellement.

Ce qui est intéressant sur cette mission en deux temps c’est que les phases de projet sont différentes : il n’y a pas les mêmes attentes, les mêmes besoins, la mission n’est pas monotone. Cela a été deux missions complètement différentes.

La mission au Tchad était moins technique, davantage axée sur des aspects relationnels, sociaux, pédagogiques. Cela m’a permis de développer d’autres compétences et de confirmer mon intérêt pour les activités de formation, de transfert de connaissances.

Dans ce type de poste, tu apprends beaucoup sur toi-même et sur une autre manière de travailler, de penser, de s’organiser. Cela fait réfléchir sur tes anciennes pratiques.

Cette expérience m’a aussi permis de connaître un même programme mais avec deux contextes, deux équipes, des acteurs différents. Mais travaillant pour le même projet, la même cause : comment résoudre un problème commun dans un contexte local différent ?

Je sais déjà que ma nouvelle expérience au Congo [en tant que Responsable Programme de la Filière Cuiseurs Economes] va être complètement différente : dans ma relation avec les collaborateurs, les partenaires, dans ma façon de penser, d’être, de travailler.

Si je devais donner des conseils à d’autres volontaires multipays, à mon sens, il est important de prévoir un temps d’intégration et d’adaptation. Au Tchad, j’ai eu deux semaines d’intégration dans le projet avec les acteurs : j’ai été formé par un forgeron pendant quatre jours, j’ai fait le tour de tous nos distributeurs, j’ai passé du temps avec chaque membre de l’équipe.

Il y a des savoirs-être que j’ai acquis au Congo que j’ai pu remobiliser au Tchad. Par exemple, la manière de s’exprimer dans un contexte culturel différent avec des personnes dont le Français n’est pas la langue maternelle. La majorité des artisans forgerons ne parlent que l’arabe tchadien.

Si j’avais commencé par le Tchad, l’expérience aurait peut-être été complètement différente. Il y a des choses que j’ai apprises au Congo et que j’ai retransmises au Tchad et il y a des choses que j’ai vues au Tchad qui pourraient servir le Congo. Chaque expérience te pousse plus loin dans l’autre expérience. Si tu sépares ces deux expériences, avec deux personnes différentes, je pense que la mission sera moins effective. La première expérience au Congo m’a permis d’être opérationnel beaucoup plus vite au Tchad.

Le plus compliqué dans la reconduite d’un poste multipays serait de savoir par quel pays commencer. Il faut se dire que le dernier pays de la mission va être influencé par les expériences précédentes.

Il faut bien identifier les besoins sur le terrain car ce genre de mission répond à des besoins spécifiques au projet à un moment donné. En fonction de ce travail, choisir quel projet sera appuyé en premier, quel projet en deuxième.

Il faut savoir rester ouvert, attentif à ce qu’on te dit, à l’environnement autour de toi, ne pas mettre les deux pieds dans le plat directement. Si tu maitrises déjà ça, tu peux t’intégrer n’importe où et mener à bien ta mission, surtout dans le cas d’un multipays parce que les environnements, les personnes sont différentes.

 

Julien PETITJEAN, VSI au Congo et au Tchad entre Décembre 2015 et Décembre 2016.